"А.Сент-Экзюпери. Vol de Nuit (фр.)" - читать интересную книгу автора

Afrique, sur le mystиre, la derniиre bourgade soumise.
Le radio passa un papier au pilote:
йcouteurs. Coucherez-vous а San Julian?>
Fabien sourit: le ciel йtait calme comme un aquarium et
toutes les escales, devant eux, leur signalaient: nul.> II rйpondit:

Mais le radio pensait que des orages s'йtaient installйs
quelque part, comme des vers s'installent dans un fruit; la nuit
serait belle et pourtant gвtйe: il lui rйpugnait d'entrer dans cette
ombre prкte а pourrir.


En descendant moteur au ralenti sur San Julian, Fabien se
sentit las. Tout ce qui fait douce la vie des hommes grandissait
vers lui: leurs maisons, leurs petits cafйs, les arbres de leur
promenade. Il йtait semblable а un conquйrant, au soir de ses
conquкtes, qui se penche sur les terres de l'empire, et dйcouvre
l'humble bonheur des hommes. Fabien avait besoin de dйposer les
armes, de ressentir sa lourdeur et ses courbatures, on est riche
aussi de ses misиres, et d'кtre ici un homme simple, qui regarde
par la fenкtre une vision dйsormais immuable. Ce village
minuscule, il l'eыt acceptй: aprиs avoir choisi on se contente du
hasard de son existence et on peut l'aimer. Il vous borne comme
l'amour. Fabien eыt dйsirй vivre ici longtemps, prendre sa part ici
d'йternitй, car les petites villes, oщ il vivait une heure, et les
jardins clos de vieux murs, qu'il traversait, lui semblaient йternels
de durer en dehors de lui. Et le village montait vers l'йquipage et
vers lui s'ouvrait. Et Fabien pensait aux amitiйs, aux filles
tendres, а l'intimitй des nappes blanches, а tout ce qui, lentement,
s'apprivoise pour l'йternitй. Et le village coulait dйjа au ras des
ailes, йtalant le mystиre de ses jardins fermйs que leurs murs ne
protйgeaient plus. Mais Fabien, ayant atterri, sut qu'il n'avait rien
vu, sinon le mouvement lent de quelques hommes parmi leurs
pierres. Ce village dйfendait, par sa seule immobilitй, le secret de
ses passions, ce village refusait sa douceur: il eыt fallu renoncer а
l'action pour la conquйrir.
Quand les dix minutes d'escale furent йcoulйes, Fabien dut
repartir.
Il se retourna vers San Julian: ce n'йtait plus qu'une poignйe
de lumiиres, puis d'йtoiles, puis se dissipa la poussiиre qui, pour
la derniиre fois, le tenta.

II toucha les contacts, mais les lampes rouges de la
carlingue versиrent vers les aiguilles une lumiиre encore si diluйe
dans cette lumiиre bleue qu'elle ne les colorait pas. Il passa les
doigts devant une ampoule: ses doigts se teintиrent а peine.

Pourtant la nuit montait, pareille а une fumйe sombre, et