"Au temps du fleuve Amour" - читать интересную книгу автора (Makine Andreï)11Le soleil se levait quand nous sortions de la taïga vers la vallée de l'Oleï. Comme si nous laissions la nuit au fond de ce royaume endormi des sapins, dans l'ombre argentée que traversait sur ses ailes le grand hibou cherchant un refuge pour la journée. Le disque rouge émergeait d'un voile froid et, lentement, effaçait les gammes du gris et du bleu avec celles du rose. En secouant notre torpeur nocturne, nous nous mettions à parler, à échanger nos impressions de la dernière séance. Mais surtout, jusqu'à l'épuisement, jusqu'à l'extinction de voix, à imiter Belmondo… Cette fois, au seizième voyage pour le film, Samouraï nous devança un peu, s'engageant à grands pas dans la plaine qui attirait par sa surface mauve et lisse. Je m'arrêtai pour attendre Outkine. Il déboucha sur ce grand espace libre et lumineux, en quittant l'ombre de la forêt, contourna le sommet d'un petit sapin noyé dans la neige et vint me rejoindre. J'étais toujours un peu gêné par son regard. Par ce mélange de jalousie, de désespoir et de résignation avec lequel il scrutait mon visage… Cette fois, il n'en était rien. Traînant sa jambe mutilée, il s'approcha de moi, son épaule droite pointant vers le ciel, et me sourit. Il me dévisageait comme son égal, sans aucune amertume ni jalousie. Sa démarche de canardeau semblait ne plus le préoccuper. Je fus frappé par la séré-nité de son visage. En reprenant la route, je me dis que je voyais ces yeux calmes et comme assa-gis déjà depuis un certain temps. Je ralentis un peu ma course en me laissant devancer et, répondant machinalement aux paroles de mes compagnons, je me mis à penser au mystère d'Outkine. Car, pour lui aussi, la séance de dix-huit heures trente était bien plus qu'une simple comédie burlesque… C'est que ce jour lointain de printemps, quand son corps avait été broyé par les glaces de la débâcle, ses yeux d'enfant avaient changé de vision. Outkine acquit alors une vue particulière que seules la douleur ou la jouissance extrêmes peuvent procurer. En ces moments, nous pouvons nous observer – avec recul – comme un étranger. Un étranger méconnaissable, dans cette douleur trop forte, dans les spasmes d'un plaisir violent. Pour quelques instants nous supportons ce dédoublement… Outkine se vit ainsi. Contre le mur clair d'une chambre d'hôpital. Sa souffrance était si dure qu'il avait presque envie de se demander: «Mais qui est-il, ce petit gars maigre qui geint et frissonne dans sa carapace de plâtre?» Oui, ce fut très tôt, à l'âge de onze ans, qu'il expérimenta cette vision – ce corps estropié qui crie, qui souffre, et, à côté, on ne sait pas trop où, ce regard détaché, apaisé. Cette présence, amère et sereine. Semblable à une journée d'automne claire, à l'odeur pénétrante de feuilles mortes. Cette présence c'était aussi lui, Outkine le savait, oui, une part de lui. Peut-être la plus importante. En tout cas la plus libre. Il n'aurait pas su dire ce que représentait pour lui ce dédoublement. Mais, intuitivement, il percevait la tonalité de cet imaginaire instant d'automne en lui… Il suffisait de fermer les yeux, de se mettre à l'unisson avec ce soleil bas scintillant dans les feuilles jaunes, avec cette odeur clarifiée de la forêt, avec cet air limpide… Et l'on pouvait se poser une question calme, désintéressée: «Mais qui est-il, ce jeune gars qui traîne sa jambe mutilée et pointe une épaule vers le ciel?…» Outkine aimait venir dans cette journée qu'il n'avait jamais vue, y rester au milieu des arbres inconnus aux larges feuilles ciselées, jaunes et rouges, qu'on ne trouvait pas dans la taïga. Regarder à travers ce feuillage empli de soleil le petit bonhomme qui s'en allait en boitant, la tête baissée sous les rafales de neige… Le mystère d'Outkine… L'essentiel, c'est que l'énorme triangle de glace qui s'était soudainement détaché de la berge du fleuve lui laissa le temps de réaliser ce qui se passait. Il eut le temps d'apercevoir la foule de badauds qui reculait en distinguant le crissement menaçant, d'entendre leurs cris. Et d'avoir peur. Et de comprendre qu'il avait peur. Et d'essayer de se sauver sans faire rire l'attroupement humain par ses bonds. Et de comprendre que c'était idiot de se soucier du rire des autres. Et de penser: c'est moi, oui, c'est bien moi, je suis seul sur cette glace qui se brise, se renverse dans les flots, c'est moi, c'est le soleil, le printemps, j'ai peur… Sa douleur, tel un cristal taché par les incrustations des impuretés, garderait cette poussière de pensées fébriles et banales. Elles se graveraient dans ce cristal, dans sa transparence de larmes gelées. Le fleuve était trop puissant, son souffle, même au moment de la débâcle, trop lent pour que le malheur puisse être subit. Les yeux du garçon le vivaient comme au ralenti. L'homme qui, ris-quant d'être lui-même écrasé par les glaces, retira Outkine, s'écria joyeusement: – Regardez-moi ce canardeau mouillé! Encore un peu et il aurait plongé… Non, mais c'est un vrai canardeau! Il continuait à pousser des petits rires, pour dissimuler sa propre peur, pour rassurer les badauds. Outkine, qui devenait à ce moment le Canardeau-Outkine, était assis sur la neige, recroquevillé en une boule humide, et il regardait l'homme qui riait en essuyant ses mains écor-chées contre son pantalon. Il le regardait de son œil trouble, profitant des derniers instants avant le déferlement de la douleur. Par un pressentiment indicible, il devinait que ce rire venait déjà d'une tout autre époque de sa vie. Et ces encouragements des badauds qui se demandaient s'il fallait appeler une ambulance, ou si le Canardeau allait se remettre tout seul en se séchant et en buvant un thé chaud. Ce soleil aussi était un soleil d'autrefois. De même que la beauté du printemps. Et ce surnom qu'il venait de recevoir – Outkine – s'appliquait, en fait, à un être qui n'existait plus – à un garçon comme un autre qui était venu contempler la débâcle en cette matinée très ordinaire de sa vie… Et quand, soudain, la neige devint toute noire, quand le soleil se mit à sonner en vibrant, en pénétrant dans le corps de sa masse brûlante, quand les crêtes des premières vagues de douleur se mirent à lui fouetter le visage, Outkine entendit pour la première fois cette voix lointaine: «Mais qui est-ce, ce petit gars qui crie sa peine en recrachant le sang de ses poumons écrasés, en se débattant dans la neige fondue comme un jeune oiseau aux ailes cassées?» Le fait que le malheur était arrivé sans hâte, au rythme de la puissance du fleuve et de l'immensité des glaces, dirigea Outkine vers une réflexion étrange et très éloignée de ses préoccupations enfantines. Il commença à douter de la réalité de tout ce qui l'entourait. A douter de la réalité elle-même… Dès le jour où, de l'hôpital, on le ramena à la maison, ce doute surgit. Outkine était assis dans la pièce de leur isba, une pièce très propre, emplie d'objets bienveillants, dont chacun faisait entendre un léger écho de souvenirs, une pièce qui avait la douce tonalité de la présence maternelle. Sa mère apporta de la cuisine une bouilloire, posa deux tasses sur la table, prépara le thé. Outkine savait déjà que sa vie ne serait jamais plus comme avant. Que désormais le monde avancerait à sa rencontre en répétant les cahots de sa démarche boiteuse. Que le tourbillon des jeux de ses camarades le rejetterait toujours du centre vers la périphérie, vers l'inaction. Vers l'exclusion. Vers l'inexistence. Il savait que sa mère aurait toujours cette intonation enjouée dans la voix et cet éclat sombre du désespoir dans les yeux qu'aucune tendresse ne saurait dissimuler. De nouveau, il se souvint de ce malheur au ralenti – la marche pesante et majestueuse des glaces, leur collision titanesque, le bruit assour-dissant du choc, l'empilement des énormes éclats découvrant ces blocs d'une transparence verdâtre, de plus d'un mètre d'épaisseur. Sa mémoire reproduisit avec une précision infail-lible la suite syncopée de ses pensées. Debout sur le triangle de glace, s'agrippant à l'impossible équilibre, il avait eu peur du rire des autres… Et c'est sans doute cette crainte du ridicule qui l'avait rendu maladroit… Oui, cela avait tenu à si peu de chose. S'il avait été un peu plus rapide, un peu moins embarrassé par le regard de la foule massée sur la rive, rien n'aurait changé. S'il s'était écarté de quelques centimètres du bord du fleuve, ce thé qu'il allait prendre avec sa mère aurait pu avoir un tout autre goût, et la journée de printemps derrière les fenêtres un tout autre sens. Oui, la réalité n'aurait pas changé. Ébahi, il découvrait que ce monde solide, évident, régi par les adultes qui savaient tout, s'avérait soudain fragile, improbable. Quelques centimètres de plus, quelques regards moqueurs interceptés, et vous vous retrouvez dans une tout autre dimension, dans une autre vie. Une vie où les camarades d'hier s'envolent en vous laissant boiter dans la neige fondue, où la mère fait un effort surhumain pour sourire, où l'on s'habitue peu à peu à ce que vous êtes comme ça, en vous figeant définitivement dans cette nouvelle apparence. Cet univers, tout à coup incertain, le terrifiait. Mais parfois, sans pouvoir l'exprimer clairement, Outkine éprouvait une vertigineuse liberté en pensant à sa découverte. En effet, tous ces gens prenaient le monde au sérieux, persuadés de son évidence. Et lui seul savait qu'il suffisait d'un rien pour rendre cet univers méconnaissable. C'est alors qu'il se mit à séjourner dans cet automne ensoleillé qu'il n'avait jamais vécu, au milieu de larges feuilles jaunes qu'il n'avait jamais vues. Il ne pouvait même pas dire comment cette journée naissait en lui. Mais elle naissait. Outkine fermait les yeux et respirait l'odeur forte et fraîche du feuillage… De temps en temps, un petit chuchotement désagréable se mettait à grésiller dans sa tête: «Cette journée n'est pas réelle, et la réalité c'est que tu es un boiteux dont personne ne veut pour ses jeux.» Outkine ne savait pas quoi répondre à cette voix. Inconsciemment, il devinait que la réalité, dépendant de quelques centimètres et de quelques ricanements de badauds, était plus irréelle que n'importe quel rêve. Ne pouvant pas le dire, Outkine souriait en plissant les yeux sous le soleil bas de sa journée d'automne. L'air était translucide, les fils de la vierge Voltigeaient en ondoyant légèrement… Et cette beauté était son meilleur argument. Et puis, un jour, il avait déjà treize ans – deux ans de sa nouvelle vie -, son grand-père lui donna à lire un récit. Le grand-père, cet ours polaire taciturne et solitaire, avait été journaliste. Son texte, deux pages et demie tapées à la machine, portait l'empreinte ineffaçable du style journalistique, presque aussi tenace que cette lettre «k» dans sa frappe, qui voulait toujours grimper plus haut que les autres. Mais Outkine ne remarqua même pas ces détails d'écriture, tant il fut bouleversé par l'histoire. Et pourtant, l'histoire n'avait rien d'extraordinaire. Tel un reporter au pays de sa jeunesse, le grand-père évoquait une colonne de soldats, embourbée quelque part sur les routes de la guerre, sous la pluie glacée de novembre. Leur armée battue, dispersée, reculait devant l'avancée des divisions allemandes, en cherchant refuge plus près du cœur de la Russie… Les forêts nues, les villages morts, la boue… «Chaque soldat emportait avec lui le souvenir de quelque cher visage, mais moi je n'avais personne. Pas d'amie, je me croyais laid etj'étais très timide, pas de fiancée, j'étais en plus très jeune, pas de parents, le destin l'avait voulu ainsi. Personne à qui j'aurais pu penser. J'étais le plus seul sous le ciel gris et bas. De temps en temps, une télègue devançait notre colonne. Un cheval maigre, un amas de malles, quelques visages apeurés. Nous étions pour eux les soldats de la défaite. Un jour, nous croisâmes une télègue arrêtée en rase campagne. Crépuscule pluvieux, vent, route défoncée. Je marchais derrière les autres. Il n'y avait plus aucun ordre dans nos rangs. Une femme, un bébé dans les bras, leva le visage comme pour nous dire adieu. Son regard effleura le mien. Un instant… La nuit tomba et nous marchions toujours. Je ne savais pas encore que je me souviendrais durant toute ma vie de ce regard. A la guerre. Puis, pendant sept longues années dans le camp. Et aujourd'hui… Marchant dans le crépuscule, je me disais: "Dans la nuit, ils emportent chacun leur souvenir. Et moi, j'ai à présent ce regard…" Une illusion? Une chimère? Peut-être… Mais grâce à cette illusion j'ai traversé l'enfer. Oui, si je suis virant, c'est grâce à ce regard. Ce refuge où les balles ne m'atteignaient pas, où les bottes des gardiens qui me fracassaient les côtes ne parvenaient pas jusqu'au cœur…» Outkine lut, relut ce récit, se le raconta à plusieurs reprises. Et, un jour, retournant à son histoire simple, il pensa: «Mais s'il ne m'était pas arrivé ce qui m'est arrivé, je n'aurais jamais compris le sens de ce regard qu'un soldat emportait dans ses yeux à travers la nuit de guerre…» Outkine était sûr de sa journée d'automne lumineuse. Mais l'homme se réveillait déjà dans ce corps d'adolescent, dans cette enveloppe frêle et estropiée. Le monde sécrétait son savoureux poison du printemps, l'ambre mortel de l'amour, la lave des corps féminins. Outkine aurait voulu s'envoler pour nous rejoindre, nous qui planions déjà dans ces émanations enivrantes. Son élan se brisait, son envol le projetait vers la terre. Il avait le même âge que moi, quatorze ans, en cet hiver mémorable. La partie féminine de l'école avait manifesté, au moment du malheur et quelque temps après, une attention particulière à son égard. Le réflexe maternel envers un enfant blessé. Mais, très vite, son état devint ordinaire, donc sans intérêt. De futures mères qui l'aimaient comme une poupée malade, ces fillet- tes devenaient de futures fiancées. Il ne les inté- ressait plus. C'est alors que je commençai à surprendre le regard qu'Outkine arrêtait sur mon visage: un mélange de jalousie, de haine et de désespoir. Une interrogation muette, mais déchirante. Et quand, lors de notre baignade, les deux jeunes inconnues nous contemplaient nus, Samouraï et moi, surtout moi, à travers la danse des flammes, je compris que l'intensité de cette interrogation pouvait un jour tuer Outkine. Mais vint Belmondo… Et en allant pour la seizième fois voir son film, Outkine sortit de l'ombre violacée de la taïga, fit quelques pas dans ma direction en me regardant avec un sourire vague comme s'il venait de se réveiller au milieu de cette plaine neigeuse éclairée du voile mauve d'un soleil matinal. Et dans ses yeux je ne retrouvai aucune hostilité maladive. Son sourire faible semblait être la réponse à l'interrogation d'autrefois. Il agita le bras en indiquant Samouraï qui marchait devant, à une centaine de mètres de nous. Puis rit doucement: – Celui-ci veut voir plus d'espionnes que nous, ou quoi? Nous accélérâmes un peu pour rattraper Samouraï… … Oui, un jour Belmondo vint… Et Outkine vit que sa souffrance et ses interrogations sans réponse avaient depuis longtemps trouvé en Occident une expression classique: la misère de la vie dite réelle et les feux d'artifice de l'imaginaire, le quotidien et le rêve. Outkine tomba amoureux de ce pauvre esclave de la machine à écrire. C'est ce Belmondo-là qui lui était proche. Celui qui montait l'escalier en gonflant péniblement ses poumons poussifs, ravagés par le tabac. Oui, cet être très vulnérable, en somme. Froissé tantôt par l'indélicatesse de son propre fils, tantôt par la trahison involontaire de sa jeune voisine… Cependant, il suffisait qu'il y ait une feuille de papier blanc dans sa machine et la réalité se transfigurait. La nuit tropicale, par le philtre magique de ses odeurs, le rendait fort, rapide comme les balles de son revolver, irrésistible. Et il ne se lassait pas de faire la navette entre ses deux mondes, pour les unir, à la fin, par son énergie titanesque: les feuilles de papier noircies voltigeaient au-dessus de la cour et la belle voisine enlaçait ce héros très peu héroïque. Outkine voyait dans ce dénouement une promesse ineffable. Et quand, à l'école, il montait le grand escalier, en traînant péniblement son pied, il s'imaginait cet écrivain traqué par les misères du quotidien, ce Belmondo des jours pluvieux. Seulement, dans le film, il y avait en haut de l'escalier la jolie voisine pleine de sollicitude amicale. Alors qu'à l'école, dans le défilé des visages rieurs, personne n'attendait Outkine sur le palier. «La vie est bête, disait en lui une voix amère. Bête et méchante…» Mais il y a Belmondo, murmurait quelqu'un d'autre… À mi-chemin de notre voyage, au milieu du parcours lumineux du soleil, nous nous arrêtions pour manger un peu. Le vent qui soufflait le long de la vallée était cinglant. Nous cherchions un abri, en nous installant sous une dune de neige modelée par la tempête. Le souffle glacial passait au-dessus de sa corniche coupante, la journée paraissait silencieuse, sans le moindre mouvement d'air. Le soleil, le scintillement éblouissant de la neige, le calme parfait. On eût dit que c'était déjà le printemps. De temps en temps, Outkine ou moi, nous appliquions nos paumes au cuir de la touloupe de Samouraï. Sa courte touloupe, peinte en noir, était chaude. Notre ami souriait: – J'ai là une véritable batterie solaire, pas vrai? Nous étions à la mi-mars, en plein hiver encore. Mais jamais nous n'avions ressenti la secrète présence du printemps aussi intensément. Il était là, il fallait seulement connaître les endroits où il s'abritait en attendant son heure. Le vent frais, un peu de nourriture, la lumière chaude nous enivraient, nous plongeaient dans un assoupissement bienheureux… Mais soudain, une rafale de vent se brisait sur la corniche de la dune avec un sifflement aigu et saupoudrait de fins cristaux de neige nos provisions – quignons de pain, œufs durs, tartines de beurre. Il était temps de terminer le repas et de repartir. Nous raccrochions nos raquettes et grimpions sur la pente blanche, en quittant notre refuge. Le souffle glacé chassait vers nous de longs serpents de poudreuse… Au coucher du soleil, nous revenions à notre silence du matin. Nous parlions de moins en moins pour nous taire bientôt tout à fait. De la brume bleutée à l'horizon, la silhouette de la ville commençait à se profiler lentement. Nous nous concentrions avant le film… C'est pendant ce seizième voyage que je perçus une vérité étonnante: nous allions voir chacun un Belmondo différent! Et une heure après, dans l'obscurité de la salle, j'observais discrètement les visages d'Outkine et de Samouraï. Je crus comprendre pourquoi Outkine ne se joignait pas aux esclaffements joyeux des spectateurs quand l'écrivain poussif luttait contre les marches raides de l'escalier. Et pourquoi le visage de Samouraï restait dur et fermé quand l'époustouflant éditeur s'approchait de la belle enchaînée pour lui enlever un sein… |
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